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16/10 - MICHEL HOUELLEBECQ :
"JE SUIS UN DISCIPLE IMPARFAIT DE SCHOPENHAUER".

 Y a-t-il un âge pour lire Schopenhauer ? « Le plus tôt possible, répond Michel Houellebecq. La désillusion n’est pas une mauvaise chose. »

Michel Houellebecq est écrivain et poète, auteur entre autres d'Extension du domaine de la lutte (Maurice Nadeau, 1994), de La carte et le territoire (Flammarion, 2010) pour lequel il a obtenu le prix Goncourt et de Soumission (Flammarion, 2015).

Depuis le XIXe siècle, le philosophe fascine des générations d'écrivains. L'auteur de "Soumission" n'échappe pas à la règle.
Interview.
PROPOS RECUEILLIS PAR FRANÇOIS GAUVIN - Publié le 14/10/2016

Le Point : À quand remonte votre passion pour Schopenhauer ?
Michel Houellebecq : Je devais avoir 25 ans. J'ai découvert dans une bibliothèque municipale un peu par hasard ses Aphorismes sur la sagesse dans la vie. J'ai aussitôt décidé de lire tout ce qu'il avait fait, à commencer par ce qu'il considérait comme son œuvre majeure. Mais, dans la préface du Monde comme volonté et représentation, Schopenhauer enjoint de commencer par lire Kant. J'ai essayé, c'était trop difficile, je me suis contenté de résumés. Je crois quand même avoir saisi l'essentiel : la chose en soi, l'être du monde est inaccessible à l'homme, qui reste prisonnier des catégories de l'entendement et de la représentation.
C'est attristant ; j'ai appris que cela avait désespéré Kleist, au point même de jouer un rôle dans son suicide. Et c'était très important pour moi, parce que Kleist, avec ses tragédies, est un auteur que j'admire au plus haut point. Il est malheureusement mort avant de connaître Schopenhauer, qui propose justement de sortir de cette impasse kantienne. Schopenhauer explique en effet qu'on peut accéder à la chose en soi par une ruse, qu'il compare à un « passage dérobé dans la forteresse » : l'introspection. Toutes choses procédant de la même source, étant de même nature, l'examen des caractères humains ne nous révèle pas simplement des vérités psychologiques, mais l'être du monde dans son ensemble. On comprend que ce soit un philosophe apprécié par les écrivains…
Y a-t-il un âge pour lire Schopenhauer ?
Le plus tôt possible. La désillusion n'est pas une mauvaise chose. S'il y a désillusion, c'est qu'il y a illusion ; et il n'est jamais trop tôt pour dissiper une illusion. Dans son Schopenhauer, éducateur, qui reste le meilleur texte jamais écrit sur lui,Nietzsche le décrit comme un enseignant rude, ou comme un père adressant un message austère à son fils au seuil de sa vie d'homme. C'est très juste. Il n'y a aucun cynisme chez Schopenhauer, mais il ne veut pas vous dorer la pilule, parce que la vérité l'exige. Il est austère mais amical.
Vous le préférez à Nietzsche ?
J'ai définitivement cessé de lire Nietzsche après Schopenhauer.
Pourquoi ?
La volonté est un concept très général chez Schopenhauer, il résume par exemple l'essence de l'architecture comme le conflit entre la volonté sous ses deux formes les plus élémentaires : la résistance et la pesanteur. Chez Nietzsche le concept se rabougrit, se transforme en une « volonté de puissance » platement anthropomorphique. Et la base de la morale est pour lui comme pour Schopenhauer la pitié, même si Nietzsche rejette la morale, ce qui ne l'honore guère. Quant à l'esthétique, n'en parlons pas… Il y a un passage peu connu de la Recherche où Proust, profond admirateur de Wagner, se moque de manière très amusante de la manie « méditerranéenne » de Nietzsche.
Mais pour le style, Nietzsche n'était-il pas plus doué ?
Nietzsche a trois styles. Celui des dissertations, comme dans les Considérations inactuelles, est mon préféré. Dans les aphorismes, il n'atteint pas tout à fait le niveau de ses modèles, les moralistes français. Enfin, il y a Ainsi parlait Zarathoustra*, qui est vraiment nul, de la pseudo-poésie. Enfin il y a encore plus mauvais, c'est l'imitation française par Gide, les Nourritures terrestres, là c'est carrément à vomir. Schopenhauer, lui, est toujours élégant et ferme. Et honnête, ce qui n'est pas un petit talent.


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* Rien  à voir, mais je vous conseille de lire "Le Fils de Zarathoustra"– 25 octobre 2006 de Pierre Lance 
Désireux de donner à son livre un ton à la fois prophétique et intemporel, Nietzsche avait choisi d'en incarner l'esprit en la personne de Zarathoustra (ou Zoroastre), fondateur légendaire du mazdéisme, religion solaire des anciens Perses, que l'on suppose avoir existé il y a environ trente siècles. Pierre Lance, qui se veut disciple de Nietzsche, a déjà publié trois ouvrages se référant à son nom : Charles de Gaulle, ce chrétien nietzschéen (1965), En compagnie de Nietzsche (1991) et Au-delà de Nietzsche (1976, réédité en 1992). Le 15 octobre 1969, pour commémorer 1e 125e anniversaire de la naissance du philosophe, il créa la Société Nietzsche, qui publia jusqu'en 1977 la revue Engadine, du nom de la région helvétique préférée de Nietzsche. Ne voulant surtout ni imiter ni pasticher le créateur d'Ansi parlait Zarathoustra, l'auteur a imaginé de lui inventer un fils qui vient, à son tour, dire aux hommes de ce temps comme à ceux de tous les temps : " L'homme est quelque cluse qui doit être surmonté. Qu'avez-vous fait pour le surmonter ? "

Sans oublier ses 3 livressur les "savants maudits, chercheurs exclus" c'est pour cela que De Gaulle les cherchaient. Les chercheurs :-)
Savants maudits, chercheurs exclus

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Que pensez-vous de son esthétique ?
Il avait une grande estime pour les arts. Il y a un passage étonnant de La Métaphysique de l'amour, où il explique que les philosophes (à peu près tous) qui ont nié l'importance de l'amour sont dans l'erreur. Si l'amour était une illusion, dit-il, il n'aurait pas pu être à l'origine de créations littéraires aussi bouleversantes. C'est la première fois à ma connaissance qu'on ait employé cet argument. Oui, décidément, on comprend que les écrivains aient apprécié ce philosophe…
Vos romans, à commencer par "Extension du domaine de la lutte", qui raconte les misères de la vie sexuelle, semblent très schopenhaueriens. C'est une influence majeure dans vos œuvres ?
Il est difficile de répondre à cette question. Schopenhauer ne m'a pas tant influencé que cela. Je le cite souvent, des phrases ici et là, mais c'est tout. Ayant lu et apprécié Auguste Comte, je crois à l'importance fondamentale de la société et de l'histoire. Schopenhauer ne croit absolument pas à l'histoire, il ne croit absolument pas que la nature de l'homme et de la société humaine puisse changer. Je suis de ce fait un disciple imparfait.
D'autres choses que vous trouvez chez lui moins réussies ?
Il est complètement passé à côté du mouvement romantique, dont il est pourtant l'exact contemporain. Mais il a vécu sa vie dans une grande solitude, rejeté par tous, avant de connaître sur la fin un succès inattendu ; il avait des excuses pour rejeter un monde qui ne voulait pas de lui. 
Il passe aussi pour un furieux antisémite…
Il n'en a aucune des caractéristiques : il estime le commerce et les arts libéraux, méprise les vertus militaires, combat le code d'honneur chevaleresque, et en plus il n'est pas de gauche... Par contre il est clairement antijudaïque, au sens religieux. Comme il va au fond des choses, il voit naturellement dans le judaïsme la racine de tout monothéisme. Et le monothéisme est le seul sujet qui lui fasse réellement perdre son calme...
Il n'est pas commode non plus envers les femmes, qu'il appelle le sexe laid…
Sa misogynie est bizarre. Il accorde aux hommes une supériorité dans l'ordre de la raison, mais aux femmes une supériorité dans l'ordre de la bonté et de la pitié. Or, si l'on suit sa propre philosophie, la bonté et la pitié sont d'un ordre incommensurablement supérieur à l'intelligence et à la raison ; elles parlent, je le cite,« le langage d'une sagesse devant laquelle toute autre doit demeurer muette ». Alors, sa misogynie, il faut relativiser…
Comment expliquez-vous qu'il vantait la compassion, tout en étant très colérique ?
Ses voisines étaient bruyantes, et il avait quand même un travail de réflexion à accomplir. Dans de telles circonstances, moi aussi, je pourrais traiter une voisine de « vieille salope »… Par contre, il est faux qu'il l'ait poussée dans l'escalier.
Il était moins difficile avec les chiens. Dans votre exposition « Rester vivant » au Palais de Tokyo, vous avez accordé beaucoup de place à votre chien Clément. La compassion, plus facile envers la race canine ?
Le chien est un cas particulier. Même si Schopenhauer rejette la nature dans son ensemble, il approuve le chien. Il a une phrase amusante : « Quant à Spinoza, il ne semble pas du tout avoir connu les chiens. » Ça résume bien les limitations du philosophe batave. Dieu est un salaud, heureusement il n'existe pas, mais il y a le chien. Qui a d'ailleurs été créé par l'homme, probablement à partir du loup ; Dieu en aurait été bien incapable.
Où situez-vous Schopenhauer dans votre panthéon personnel ?
Haut, très haut. Le premier des philosophes.



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